Amazon, dictateur de la musique en téléchargement ?

Avant-propos:
Voici un article, sous forme de coup-de-gueule, qui me vient spontanément pour parler d'un problème peu visible mais pourtant bien réel. Celui-ci m'est venu alors que je cherchais à m'acheter les albums de deux musiques originales de films récents : HTTYD : The Hidden World, et First Man.

J’ai entamé une réflexion sur notre capacité à se procurer de la musique il y a déjà quelques années, mais récemment, une récente affaire m’a faite réaliser que l’heure était grave.

L’accès à la musique est aussi vital pour moi que l’accès à l’eau, et je réalise que son économie tourne autour de nouveaux supports numériques qui jadis me plaisaient plutôt bien, et soulèvent aujourd’hui en moi de grandes craintes.

J’ai toujours refusé d’aller chez Apple par refus de vivre dans un système fermé, ou tout serait relié aux dictats d’une marque. Et pourtant, la musique tout entière est, progressivement, en train de se faire enfermer de la même manière.

La démocratisation du Web est arrivée, provoquant ainsi l’effet d’une bombe atomique pour l’industrie musicale. Lourdement blessée par le piratage qui sévissait à tout va dans les années 2000 et jusqu’au milieu des années 2010, l’industrie musicale retrouve doucement un équilibre grâce aux plateformes de streaming. Deezer, Spotify, Apple Music, Amazon Prime, YouTube Music (Google)… Nous les connaissons très bien ces plateformes de musiques. J’ai moi-même utilisé Deezer quelques années, et j’en étais très heureux, comme tout le monde.

Où est le problème ?

L’année dernière, avec l’achat de mon Samsung Galaxy S8 (je précise la marque car celle-ci dispose d’un très bon lecteur de musiques intégré), j’ai recommencé à écouter de la musique disponible sur mon disque dur, ou mes CDs. Ma bibliothèque musicale, en comptant les CDs que j’ai numérisé et les musiques que j’ai déjà sur mon disque dur, compte environ 3000 titres (et ceux sans compter les nombreux CDs que je n’ai pas encore numérisés). Et parmi ces 3000 titres, beaucoup ont une qualité sonore supérieure à celle proposée par les plateformes de streaming.

De là, j’ai commencé à faire le calcul économique.

« L’illimité pour 10€ par mois » nous vendent les plateformes, comme le doux rêve d’une liberté absolue pour un prix décent. La liberté ? Pas tellement. Je ne peux pas faire de playlists avec des musiques qui ne sont pas sur la plateforme en question. Cela implique que je ne peux pas mélanger des créations personnelles (où celles d’amis ou de musiciens amateurs) à des chansons de labels. Et surtout, si je veux garder ma qualité d’écoute, et ne pas être infesté de publicités, je dois payer 10€ chaque mois, sinon : aurevoir mes musiques, mes playlists, mon univers quotidien… On n’écoute plus notre musique, on va sur Spotify.

Mais 10€ chaque mois, c’est comme faire un chèque de 120€ chaque Noël à Deezer  (ou équivalent). Et en soit, je n’ai rien contre l’idée de donner 120€ à l’industrie musicale. Ce qui me pose problème, c’est les monopoles. La centralisation du pouvoir sur quelques plateformes, et l’impossibilité de choisir ce qu’on veut vraiment payer.

120€ par an. Est-ce que c’est ce que je paye naturellement en achetant des CDs, en téléchargeant des musiques ? Pas vraiment. La plupart du temps, nous écoutons les mêmes musiques. Nos listes de lectures (playlists) sont tenaces, car elles évoluent sur le long terme, au fur et à mesure que notre mentalité évolue. J’ai calculé que chaque mois, j’ajoutais entre une et trois nouvelles musiques à mes playlists.

J’ai donc d’abord opté pour Amazon Music, qui propose presque toutes les musiques pour 1,30€ le titre. Et puis, j’ai voulu voir si on pouvait s’échapper des Gafam pour se procurer de la musique.

 

Je me suis tourné vers la plateforme Qobuz. Celle-ci présente pleins d’atouts. D’abord, elle est adaptable : on peut choisir de payer chaque mois (comme Deezer ou Spotify), ou de télécharger en définitif les titres. En plus, elle propose des musiques en haute qualité d’écoute (avec les formats de CDs, et plus encore). Ayant acquis un casque de qualité, c’était une bonne raison pour avoir des pistes de bonnes qualités également, et mettre de côté au maximum le MP3.

Seulement Qobuz a ses limites. Son catalogue est bien moins fourni qu’Amazon Music (qui propose ses musiques en qualité standard MP3).

C’est la recherche de deux albums qui m’a fait réaliser le problème. Je souhaite ainsi me procurer la musique des films First Man (Justin Hurwitz) et How to Train Your Dragon: The Hidden World (John Powell). Ce sont deux films récents, et ils ont comme point commun d’avoir une musique assez extraordinaire et inspirante. Mais malheureusement pour moi, ces deux albums ne sont pas disponibles sur Qobuz.

J’ai pensé à aller voir la section téléchargement de la Fnac. Malheureusement pour moi, cette section n’existe plus. Le géant français du numérique a tout simplement relié son département à un abonnement Deezer !

J’ai commencé mes recherches sur internet. Internet, c’est l’idée d’une porte ouverte pour tous, n’est-ce pas ? Impossible à concevoir qu’une poignée de groupes américains aient réussi à fermer tous les néo-disquaires en lignes ? Et pourtant… Les résultats que j’ai trouvés se divisaient en deux catégories : des propositions moyennement légales pour télécharger des musiques YouTube en MP3, ou des articles qui dataient d’il y a 10 ans, de sites qui ont fermé leurs portes depuis.
Le seul résultat visible sur Google qui répond à ma demande : Amazon Music.

Tant pis. A défaut de ne pouvoir commander que quelques pistes, je vais devoir payer plus cher, et me procurer les CDs en physique. Mais je n’avais pas compris que le monde matériel avait lui aussi bien changé. Ce sont deux albums récents, sortis cette année, et pourtant… à la Fnac des Halles, ils ne sont pas trouvables ! Je me rends ensuite à la Fnac Montparnasse… même bilan. La capitale culturelle du monde n’est plus en mesure de vendre les musiques de films du moment. Pourtant je ne cherche pas un petit film d’auteur, je parle de deux grandes musiques orchestrales venues d’Hollywood et qui enregistrent des scores d’écoutes impressionnants sur YouTube. Le rayon des musiques de films s’est amoindri considérablement, et ne proposent plus que quelques titres du moment, et quelques classiques. Sinon ce sont des compilations de compositeurs célèbres, et de la musique de séries télévisées.

L’offre est pléthorique chez les Gafam, mais inexistante pour le reste ? 
Est-ce ça l’avenir d’internet ?

Avec mon système, je paie en moyenne 3€ à 6€ par mois pour avoir des musiques avec un son haute-définition. Et si je décide de ne plus rien payer, tout fonctionne exactement de la même façon. Ce qui est acquis est acquis. En plus je peux être libre d’avoir vraiment des musiques de toutes les origines, et non seulement ce que la plateforme a acceptée.

Seulement voilà, ce système semble être de plus en plus contrôlé par les Gafam et les plateformes de streaming, qui détruisent la concurrence avec acharnement pour ne plus laisser d’autre choix aux citoyens que de ne pouvoir jurer qu’en leur nom.

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